Bouclier anti émeutes, check.
Casque intégral, check.
Numéro de téléphone du médecin le plus proche, check.

Ces vérifications établies, je peux me lancer sans trop de crainte.
Je n’aime pas tellement Space Harrier. Ca vaut aussi pour le II que j’ai pourtant écumé sur Mega Drive à l’époque où on se disait qu’un jeu c’est un jeu et tous valent la peine d’être joués.

Alors, que nous soyons bien d’accord, Yû Suzuki a réalisé une prouesse technique. L’effet de profondeur, les zooms, la rapidité, la musique iconique, tout y est et… pourtant, rien à faire, il faut que je le dise, il faut que je sorte du placard, je n’aime pas Space Harrier.

J’ai toujours eu du mal avec l’immersion sur ce jeu, d’accord, la pseudo 3D est terriblement impressionnante et embarque le joueur dans l’action, mais ensuite, la confrontation au bestiaire psychédélique m’a toujours fait un effet de douche froide. Rien que l’image de présentation sur arcade (et 32X, dans sa version super fidèle) a de quoi laisser coi. Un mammouth cyclope ? Allons-y. Alors, oui, je sais que ce bon Suzuki avait pour ambition de créer un univers complètement inédit et original, sur ce point c’est réussi, mais tout de même, on dirait vraiment qu’il y a eu un tirage au sort pour générer les différents antagonistes.

Mais bon, tout cela n’est que cosmétique et ce n’est pas ce qui me dérange le plus dans ce jeu.
Ce qui m’a toujours agacé, c’est cette vue à la troisième personne. Le personnage (dont je n’ai par ailleurs jamais non plus aimé le design, avec son pyjama et son lance roquettes sous le bras, cheveux blonds au vent) est au premier plan, et ses tirs partent directement de son sprite, du coup, pour tirer sur quelque chose, il faut se trouver pile en face de ce quelque chose, masquant ainsi les tirs ennemis. Je reconnais avoir eu de grands moments de colère du genre « mais lutin de merle (oui je censure) lààààà c’est dégueulasse j’voyais paaaaas làààà » et même chose pour les obstacles. Combien de piliers, combien d’arbres, m’ont fait détester la vie, là, subitement ?

Et puis, il y a autre chose qui m’agaçait au plus haut point, ou du moins me faisait tout le temps maugréer dans ma barbe (factice). A chaque nouveau système, Sega y allait de son Space Harrier ! ( et même sur d’autres systèmes, sur TOUS les systèmes serait-on tenté de dire en frissonnant à l’évocation de la version CPC) Sur Master System, c’était une prouesse, l’arcade à la maison à peine un an après la sortie en salles, et en 3D. Sur Megadrive on sourit un peu en voyant débouler Space Harrier II en 1988, on reste sur le même principe d’accès au jeu d’arcade pour tous… même si. Mais quoi ? Ah oui, devinez qui guettait dans l’ombre au lancement de la 32X, un sourire sardonique aux lèvres ? SPACE HARRIER ! En 1994 on rêve de Saturn, on rêve du futur et là, là, sous la lumière blafarde, SPACE HARRIER ! Ah mais attendez, vous voulez une Saturn ? Hein, vous en voulez ? Pas de problème ! On vous le met aussi sur Saturn les gars, aucun problème !

Bon, je me calme. Rangez les seringues je vais conclure et après je serai sage, promis.

Alors, je sais, c’est une honte totale de cracher sur une œuvre du grand maître Sega lui-même, c’est même à la limite du blasphème, mais, je nuancerai d’une part en disant que je ne crache pas, je râle tout au plus et ça n’engage guère plus de monde que moi, (en plus ça me faisait plaisir de le revoir dans les salles d’arcade de Shenmue) et d’autre part, en faisant remarquer que dans la carrière de Yû Suzuki, un petit bémol, un jeu techniquement au maximum mais qui ne m’apporte aucun plaisir de jeu, ce n’est qu’un petit creux avant un nouveau sommet, et ça, ça donne du relief à une carrière, avec ou sans lunettes 3D.

fate82 en CC sur Deviantart