Peut-être le saviez-vous, votre Révérend est un passionné de Disney.
Alors entendons-nous, je parle avant tout des classiques, incluant les Silly Symphonies et les cartoons de Mickey, Donald et retout le gang. L’influence de la firme sur mon travail d’illustration par exemple est indéniable et j’aime pasticher le style des tous premiers dessins animés de Mickey des années 20 et 30 ainsi que la patte du brillant Ub Iwerks.
J’ai été bercé par les grands films qui ressortaient parfois au cinéma en alternance avec les nouveautés et très rapidement j’ai rêvé de moi aussi devenir un grand dessinateur. Maintes fois le château de la Belle au Bois dormant (mais aussi celui de la sorcière du jeu Cauldron sur Amstrad c’est juste) m’a inspiré le dessin de tours effilées et nombreuses à l’horizon, perchées sur un rocher escarpé. Encore aujourd’hui je me délecte du travail des artistes qui posèrent les bases de l’animation occidentale et, si Le Roi Lion est le favori de presque tout le monde (semble-t-il) je ne ressens pas devant ce long métrage la même extase visuelle que celle que me procure Bambi, prouesse de 1942 (!!!) qui offre autant de divertissement familial que de prouesses artistiques d’avant-garde jamais égalées (et je vous encourage très vivement à regarder Bambi avec des yeux neufs, vous verrez à quel point l’expérimentation visuelle et la maîtrise esthétique sont à couper le souffle).
Pour qui aime à étudier le game design, les parcs Disney sont un modèle grandeur nature du genre, particulièrement notre version anciennement connue sous le nom d’Eurodisney qui doit diriger subtilement et raconter des histoires à un public multilingue et multiculturel sans passer par l’écrit ou l’oral. Dès la création du premier Disneyland en Californie ce principe sera développé et reste aujourd’hui un bon support pour illustrer le principe primordial du « show, don’t tell ».
J’arrive à Talespin, rassurez-vous.
Dans les années 90, je ne sais pas vous mais moi je me levais le matin pour regarder les dessins animés. Le dimanche, nous avions le droit au Disney Club émission dans laquelle des séries animées de Disney étaient diffusées. Tic & Tac Rongeurs du Risque, Les Gummis et, évidemment, Super Baloo version française de Talespin. Dans cette série qui réemploie les personnages du Livre de la Jungle, Baloo est un pilote d’hydravion dans la ville insulaire de Crêpe Suzette qui loue ses services, façon Han Solo, à qui veut bien débourser un petit peu.


Mais et le jeu alors ?
Oui, oui bon j’y vais, mais déjà je ne suis pas pressé d’y revenir et ensuite, vous allez-voir, le jeu non plus ne se presse pas.
Vous pensez bien qu’enfant puis ado, muni d’une Megadrive, il n’y avait aucun risque que je rate les adaptations Disney sur console. Le sublime Castle of Illusion a été mon point d’entrée dans cet univers et je ne saurais vous répéter tout le bien que je pense de Quackshot qui lui a succédé (hello Manji). J’ai été également émerveillé par World of Illusion (hello Machintruc) plus tard, ainsi que par le brillant Aladdin, les chouettes Jungle Book et Lion King même si ces deux derniers ne m’ont pas autant marqué. J’avais évité sans le faire exprès le cas Fantasia, ainsi je n’avais en tête qu’un seul théorème : Disney+Megadrive=Jeu Exceptionnel.
Et bien je peux vous dire que je n’avais pas encore joué à Talespin ! Générique !
J’espère que vous aimez les serpents ressorts et les panthères gangsters car vous retrouverez ces deux ennemis TOUT au long du jeu.
The Beached Surfer…bear ?
Si on est un peu familier de la ludothèque de la Megadrive, on se souviendra peut-être de ce jeu estival qu’était Greendog. Il s’agit d’un jeu dû à Interactive Designs qui a tant plu que le studio a finalement été absorbé par Sega. Dans ce jeu, on incarnait un surfeur déguingandé à la recherche d’un trésor qui le libèrerait d’un collier maudit l’empêchant de surfer. Loin d’être un chef d’oeuvre, le jeu a néanmoins son charme avec sa musique calypso, ses décors des Caraïbes et son héros qui n’aurait pas dépareillé aux côté d’un Fido Dido ou d’un Bart Simpson. Malgré de nombreux défauts et une rigidité certaine, j’ai d’excellents souvenirs de ce jeu, une sympathie totale qui me vient de sa découverte à l’époque de la fameuse Sega Vidéo de Megaforce où il apparaissait (il faudra que je parle de cette vidéo un de ces jours).
S’il ne s’agit pas d’un hit, le résultat a dû convaincre, car c’est bientôt aux commandes d’un jeu Disney que se retrouve l’équipe d’Interactive Designs, pas d’un grand classique puisqu’on parle d’une série télé, mais tout de même.
Tiens, on peut refaire un théorème, regardez : Disney + Jeu des Années 90 sur Megadrive = Jeu de Plates-Formes ! Heureusement, j’ai toujours adoré les jeux de Plates-Formes, c’était même mon genre préféré avant de découvrir qu’il y avait aussi des jeux d’aventure. Talespin applique donc ce théorème avec une petite dimension de recherche, car Baloo (ou Kit, on peut choisir) doit accumuler un certain nombre de caisses afin d’être autorisé à quitter un niveau. Il peut également ramasser d’autres caisses, vides celles-ci, et, s’il se trouve coincé par une hauteur impossible à franchir, Baloo n’aura qu’à lâcher une bonne caisse pour se sortir du pétrin. Comme Baloo est un pilote émérite, nous avons également le droit à des phases de shoot en hydravion (ou sur un surf volant tracté par l’avion si on joue Kit) qui complètent l’expérience et ajoutent un peu de variété. Pas mal ? Qu’est-ce qui pourrait mal se passer ?
Ceux qui auront joué à Greendog s’en rendront compte très vite, ce n’est pas décalqué mais il y a de grosses similitudes entre ces deux jeux. Les phases de plates-formes qui alternent avec les phases de shoot, les boss au comportement identique d’un niveau à l’autre, les armes (un jokari ou un lance-pierres), la musique caraïbe et les bruitages semblent interchangeables entre les deux jeux également. Graphiquement on retrouve cet esprit de visuels très chargés avec un côté granuleux qui était déjà présent dans Greendog. Mais ce qui frappe le plus, c’est bien la maniabilité des personnages. Malgré leurs gabarits bien différents, Baloo et Kit sont LOURDS ! Greendog avait également ce feeling, on pouvait se demander si notre surfer n’était pas un peu « fatigué », cependant Baloo et Kit vivent d’eau fraîche et de verdure que leur procure la nature, ils ne devraient pas avoir l’air de sortir d’une grosse soirée trop enfumée.
Si le jeu n’exigeait pas des reflexes particulier ça ne serait pas dramatique, hélas, le titre n’a pas avec le joueur la même indulgence qu’il a avec sa qualité ! En aucun cas adaptée à un jeune public, la difficulté est elle aussi bien pesante.
L’hydravion de Baloo dans le ciel et dans les cavernes, paresseusement évolue entre les ennemis et les projectiles.
On va où ?
Ben ça je ne sais pas !
Car, je vous l’ai dit, afin de terminer un niveau, Baloo doit récupérer les caisses de marchandises cachées. La seule indication à l’écran c’est leur nombre, avec un décompte, sinon les ours doivent se débrouiller tous seuls. Certaines sont sur le chemin, d’autres ne sont accessibles qu’en passant à travers des murs et, il y a un timer. Sinon ce n’est pas drôle vous êtes d’accord ? Dans ces conditions ça serait dommage que les niveaux soient mal conçus, brouillons et inutilement labyrinthiques. Malheureusement, les niveaux sont mal conçus, brouillons et inutilement labyrinthiques.
Les stages en avion n’apportent qu’une rupture de rythme car on est loin des excellents shoots de la Megadrive. Ici, l’hydravion se déplace poussivement dans des cieux mornes attaqué par des nués d’ennemis déprimés dans une absence totale de sens de l’épique.
Quant aux boss, je vous le disais, c’est toujours le même schéma. On croise un sale type à la douane (pourquoi y a-t-il une crevasse au milieu du bureau d’enregistrement, on ne sait pas) et il nous attaque mollement sur quelques frames d’animation avec telle ou telle autre arme peu inventive (l’aimant est super pénible par exemple).
On nous a quand même vendu un tour du monde, ce qui permet à nos Super Ours de visiter dans l’ordre : la jungle, une ville au style art-déco, l’Italie avec ses fontaines et ses célèbres égouts, la Grèce avec ses temples et ses célèbres chutes d’eau, l’Egypte avec ses pyramides et ses célèbres plates-formes avec des pics, l’Inde avec ses temples (verts) et ses célèbres rien de spécial, New-York avec ses gratte-ciels et ses célèbres égouts, San Fransisco avec son pont et ses célèbres tuyaux dans le ciel. Enfin on termine en avion par la caverne des pirates des airs et le méchant Don Carnage.
Quelques objets vont bien évidemment aider, un peu, nos héros dans leur aventure, des hamburgers qui traînent dans la nature vous redonnent un peu de vie (ainsi qu’une probable intoxication alimentaire), on trouve des items d’invincibilité, de vitesse et des vies supplémentaires, on trouve également des cornets de glace qui…paralysent les ennemis. Le strict minimum là où Greendog gagnait en originalité avec des items plus variés qui de plus pouvaient être conservés pour une utilisation optimale au moment désiré.
Carnavalage ! (carnaval+carnage)
Eh ben dites-donc c’est pas très bien Talespin ! J’aurais pu trouver plus inspirée conclusion mais c’est pourtant bien la vérité. Sans atteindre le ratage de Fantasia, on ne passe tout de même pas un très bon moment dans les déambulations de nos deux compères ours pas trop léchés. Tout est lourd, rugueux, paresseux et terne. La possibilité de jouer à deux en même temps ne suffit même pas à donner un peu de fun à ce jeu qui ferait passer le parcours de santé de Saint Léonard de Noblat pour l’aventure de l’Arche Perdue. Même la musique semble avoir du mal à respirer et ce dès l’écran titre où le thème semble tellement fatigué !
Sega et Disney manquent ce rendez-vous qui n’était de toutes façons pas très attendu. On retrouve à peu près le même sentiment et la même impression de pénibilité sur le jeu La Petite Sirène (de chez Blue Sky) sur la même console, avec ce même manque de tout ce qui pourrait être attrayant dans un jeu vidéo.
En déguisant mal sa paresse et en grimant en moins bien un titre bien plus réjouissant, Greendog, Interactive Design nous fait nous dire que finalement, il en faut quand même un peu plus pour être heureux !

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